Quand je vous dis que le sport et le capitalisme partagent les mêmes valeurs ! Lisez ce texte de précaires anonymes et surtout, demain, arrêtez de
courir.
Citation :
"Le projet [...] est basé sur le postulat suivant : les qualités nécessaires pour trouver ou retrouver un emploi sont les
mêmes que celles développées par les sportifs d’une manière générale et les coureurs à pied en particulier."
Le goût de l’entraînement, du dépassement de soi, de l’effort, de la docilité aux ordres, de la compétition... ces "valeurs du sport", on demande
aux chômeur-ses-candidat-es de les mobiliser dans leur démarche d’emploi ! ...
Bises
Z.Z
La course à l’emploi, pour aller droit dans le mur ? Un, deux, trois, on ne joue
plus !
L'armée de réserve des travailleurs au pas de course
La Direction du Travail veut faire courir plus encore les chômeur-ses.
Ca y est, la DDTEFP* a trouvé une solution toute belle face à un marché du travail où le chômage pèse lourd... L’opération est presque
"révolutionnaire" puisqu’elle a été nominée aux dernières Victoires décernées chaque années lors des très néo-libérales "Rencontres de la Modernisation de l’État". Mais - manque de
perfomance ? -, l’initiative tourangelle a été recalée... Bon, cette initiative donc, dénommée "les Foulées de l’Emploi" consiste à... faire courir 20 chômeur-ses aux 10 et 20 km de
Tours, le dimanche 27 septembre* prochain. Bien sûr ces candidat-es sont spécialement encadré-es et entraîné-es pour leur course, aussi bien sportive que professionnelle.
Mais pourquoi diable la Direction du Travail (où les agents se plaignent de la faiblesse des moyens pour leur mission de contrôle des conditions
de travail) trouve bon de dépenser du fric pour préparer des chômeur-ses aux 10 et 20 km de Tours ?!
Certains ne le savent peut-être toujours pas, mais un-e chômeur-se ou un-e précaire, ça court déjà beaucoup.
Ca court entre les administrations, services et autres lieux de travail, les patron-nes, les contremaîtres, les conseiller-es, les
formateur-rices, les A.S., les agents, les contrôleur-ses, les zélateur-ses, les appels et autres interfaces virtuelles, les rendez-vous, les suivis, les dossiers, leurs foutues paperasses et
leurs règles obscures, les recherches dûment certifiées, les calculs et estimations de ressources, de temps, de plaquettes de beurre, les justifications et justificatifs, et tout ce qui court
dans nos cervelles forcément perturbées.
Certaines de ces cervelles proposent quelques réponses : mobilisation de l’ "Esprit du sport" ; développement et mise à profit, des
*qualités personnelles extra-professionnelles* des individus (au service de la recherche d’emploi et de l’éventuel futur emploi) ; déploiement de *partenaires privés* où le Service Public de
l’Emploi n’est qu’un rouage parmi d’autres ; entretien d’une *illusion* faisant oublier l’état défavorable (pour les salarié-es et chômeur-ses) du marché du travail, mais suggérant que les
solutions face à ce marché, ce sont les *stratégies individuelles de vente de soi* et que les *services d’insertion* ont donc un rôle nécessaire en "encadrant" les chômeur-ses...
"Cours toujours t’auras du piston, où comment s’assurer de notre servilité..."
C’est bien une opération de com’ clairement idéologique (comme en organise tant Pôle Emploi : Printemps de l’emploi, Train de l’emploi, ...
Foulées de l’emploi). Un communiqué officiel l’affirme :
"Ce projet a pour objectif d’accompagner des demandeurs d’emploi dans leur insertion professionnelle sur un mode de type
parrainage en s’appuyant sur la pratique sportive [...] et de constituer une équipe composée de demandeurs d’emploi et d’acteurs de l’insertion professionnelle".
À cette fin, la DDTEFP a trouvé tout un tas de comparses-partenaires pour se moquer ainsi des chômeur-ses et de leurs homologues salarié-es
contraint-es par la menace du chômage.
*Politiques* (Conseil Général 37, Tours+),
*patrons* (organisations patronales dont le Medef, Jeune Chambre Économique, Chambres consulaires, Club Régional d’Entreprises Pour
l’Insertion),
*professionnel-les et profiteur-ses de l’insertion professionnelle* (Missions locales, Pole Emploi, Cap Emploi),
*entreprises commerciales-sponsors* (Decathlon, Geodis) se prennent la main...
Pour nous mettre au pas de course, tout autant que pour faire croire que "la clé du problème" ce sont les chômeur-ses qu’il faudrait rendre
individuellement compétitif-ves, employables... on court sûrement pas encore assez.
Pour les pauvres élu-es des "Foulées de l’Emploi", le credo est cours toujours t’auras du piston.
C’est sûr la course à pied leur amènera un joli emploi. Car en plus d’un *entraînement sportif* avec un professionnel depuis avril dernier, illes
ont droit à un *surencadrement dans leur recherche d’emploi*. Celle-ci s’insinue jusque dans les entraînements sportifs où des cadres dynamiques et des entrepreneur-ses *s’entraînent* aux côtés
de leur éventuel-les futurs employé-es ; nul doute (assurément c’est ce qu’on veut nous faire accepter) qu’entre celleux qui courent pour le fun et celleux qui courent pour survivre, les
rapports sont tout à fait libres et égaux.
Non content-es du suivi habituel, les *chômeur-es-candidat-es* auront droit à des *"parrains"* (sic), seron mis en contact avec "le monde de
l’entreprise" et des "décideurs", s’entraîneront à la simulation d’entretiens, et, géniale trouvaille, leur C.V. seront diffusés* dans les milieux de gens bien placés.
Plus clairement encore :
"Le projet [...] est basé sur le postulat suivant : les qualités nécessaires pour trouver ou retrouver un emploi sont les
mêmes que celles développées par les sportifs d’une manière générale et les coureurs à pied en particulier."
Le goût de l’entraînement, du dépassement de soi, de l’effort, de la docilité aux ordres, de la compétition... ces "valeurs du sport", on demande
aux chômeur-ses-candidat-es de les mobiliser dans leur démarche d’emploi ! ...
"On achève bien les chevaux", ça vous dit quelque chose ?
Jusqu’où, sous prétexte d’efforts à faire, serons-nous prêt-es à tordre nos existences de façons humiliantes pour d’éventuels
pécules ?
Que ce soit l’opération les "Foulées de l’Emploi" ou la politique de traitement des chômeur-ses (plutôt que du chômage), nous n’acceptons pas la
participation à ces foires aux bestiaux. *Nous refusons* la logique de compétition* prônée par la DDTEFP (Pôle Emploi étant sur la même ligne) au travers des "Foulées de l’Emploi" comme remède au
chômage, qui cherche à individualiser* les stratégies sociales et à *départager* des gagnants et des perdants.
Nous refusons cette logique où il n’y a d’autre choix que d’*écraser* les autres ou de se faire écraser.
Et plus encore nous refusons l’injonction qui nous est faite d’y *prendre part*, notamment au travers des nouvelles politiques (*flicage*) de
l’emploi.
Refoulé-es de l’emploi, peut-être, en tous cas nous n’entendons pas être de la chair à patrons !
Résistons à la course au travail obligatoire, défendons nos droits, brisons l’isolement, organisons la solidarité
collective !
Stop aux serrages de ceintures et au lavage de tête ! Marathons de l’insertion hors de nos vies ! Des Golden
parachutes, des bonus, des retraites-chapeaux pour tous ! Reprenons notre droit à la vie !
Collectif-Précaires : precairestours@no-log.org / tél. 0659449916